École Bara  : Fermera ? Fermera pas ? Procès le 15 Juin

Interview du Collectif Palaiseau École Humaine
Rupture des cycles d’enseignement, non-accessibilité aux élèves en situation de handicap, cantine surchargée, concertation à sens unique… Ces derniers mois, le projet de fusion des écoles du centre, qui entraînerait la fermeture de l’école maternelle Bara dès la rentrée 2017, a suscité de nombreux débats entre les parents d’élèves et la communauté éducative palaisienne. Le Collectif Palaiseau Ecole Humaine s’est formé dans la foulée des délibérations votées au conseil municipal de décembre 2016. Ses membres ont déposé une requête au Tribunal Administratif de Versailles afin d’obtenir l’annulation du projet de fusion. Le procès aura lieu le 15 juin prochain. Nous avons rencontré le collectif afin d’en savoir plus sur cette action en justice.


Le Petit ZPL : Est-ce que vous pouvez nous présenter le Collectif Palaiseau École Humaine ?

Louise : Le collectif « Palaiseau École Humaine », ce sont des parents, et des citoyens, qui ont décidé de ne pas rester inactifs face aux délibérations qui ont été votées en conseil municipal en décembre 2016, à savoir : la fermeture de la maternelle Bara, et la fusion des écoles Morère et Deloges. Il s’est créé de façon naturelle et spontanée autour de l’idée de réagir, et d’agir en tant que citoyen. Nous souhaitons d’une part informer les palaisiens des politiques éducatives menées par la municipalité, des décisions et des conséquences que cela entraîne sur les conditions d’accueil et d’enseignement proposées au sein des écoles de Palaiseau ; et d’autre part, nous assurer de l’épanouissement des enfants dans des conditions éducatives respectueuses de leur développement.

Le Petit ZPL : En février dernier vous avez saisi le tribunal administratif de Versailles, pourquoi ? Êtes-vous persuadés du bien fondé de votre action ?

Flora : Effectivement nous avons pris la décision de saisir le tribunal administratif, puisqu’une fois que les délibérations avaient été votées, il n’y avait pas 36 000 actions possibles. Beaucoup de palaisiens sont contre le projet et le maire délibère à l’encontre de l’opinion générale. Plus de 1 700 personnes ont signé une pétition concernant la fermeture de cette école qui accueille 84 enfants. Même les équipes pédagogiques étaient majoritairement contre : les quatre conseils d’écoles ont ainsi rendu un avis défavorable à ce projet. La seule solution était donc de saisir le juge administratif. D’autant plus qu’à la lecture du dossier, on constate bien que le maire a fait voter cette délibération dans la précipitation, puisqu’il n’a pas respecté un certain nombre de règles de procédure. Par exemple, il n’a pas attendu l’avis de la préfète. Sur le fond, il n’y a pas de perspective d’amélioration pédagogique. De plus, on a une démographie qui évolue en centre-ville, avec un espace réduit pour accueillir nos enfants, sans parler du non-respect des préconisations de l’Éducation Nationale, concernant les cycles d’enseignement, ainsi que de la législation sur l’accès aux personnes handicapées. Et ces points demeurent après la réunion d’information du 29 mars. Donc oui, il nous paraît actuellement nécessaire que le juge vérifie la légalité de la délibération.

Le Petit ZPL : Seulement 29 parents ont saisi le tribunal administratif, pourquoi ?

Louise : Très concrètement, les délibérations ont été votées lors du conseil municipal du 12 décembre, et le collectif ne s’est créé que début janvier à la suite des vacances scolaires. Car c’était une période calme, beaucoup de gens étaient absents. Et, comme il fallait déposer la requête dans le délai de deux mois, soit le 12 février, nous avons manqué de temps pour mobiliser et avons dû réagir très rapidement.

Flora : D’ailleurs d’autres parents nous ont dit que s’ils avaient eu plus d’information sur notre mobilisation, ils auraient eux aussi participé à la requête.

Adeline : Moi j’ai rejoint le collectif récemment, à la suite de la réunion d’information du 29 mars. Parce que j’ai vu que ce que l’on nous disait dans cette réunion n’était pas fiable, pas concret, pas stable. Et si j’avais su qu’il y avait ce recours plus tôt, j’y aurai participé. D’autres parents auraient sûrement fait la même chose.

Louise : Nous avons proposé aux associations de parents d’élèves, la FCPE et l’AAPE, de se joindre à l’action en justice car nous pensions que cela nous donnerait plus de poids ; ces associations ont pour notoriété d’être de vrais interlocuteurs face aux administrations, et face aux équipes pédagogiques. Cependant ces associations ont fait le choix de ne pas nous suivre. C’est dommage, car cela aurait permis de créer un rapport de force plus sain. Nous sommes bien entendu toujours ouverts au dialogue.

Le Petit ZPL : Pensez-vous que des parents se dissuadent de participer à l’action ?

Louise : Oui très certainement. Peut-être parce qu’ils craignent que cet engagement puisse avoir des répercussions sur leurs enfants à l’école.

Flora : Nous avons eu des retours de parents qui avaient peur des conséquences sur leurs enfants, effectivement. Surtout, si les communes comme la nôtre commencent à demander des condamnations à hauteur de 1000 euros de frais de justice, cela risque d’encore plus dissuader les citoyens de mener des actions en justice.

Le Petit ZPL : Que voulez-vous dire par « 1 000 euros de frais de justice » ?

Flora : Dans un procès, les frais comme les honoraires d’avocat, les droits de timbre, la reprographie, les envois postaux, sont en principe à la charge de chacune des parties au procès. Toutefois, la partie condamnée peut également l’être à rembourser tout ou partie des frais engagés par son adversaire. Dans notre affaire, la commune a demandé le versement de 1 000 euros en cas de rejet de notre requête alors qu’à ce stade de la procédure aucun avocat ne s’est à priori constitué de leur coté.

Le Petit ZPL : Y a t-il des parents qui sont pour la fusion ?

Fanny : Il y en a. Principalement pour des raisons pratiques, parce qu’ils habitent plus près de Deloges et Morère que de Bara, mais nous n’avons eu aucun retour de parents qui sont favorables à la fusion pour des raisons pédagogiques.

Le Petit ZPL : Où en est l’état d’avancement de l’action de justice ?

Flora : L’audience est prévue pour le 15 juin prochain, alors qu’il a souvent été dit par les représentants de la commune que la procédure judiciaire serait longue et que cela n’aurait pas d’incidence sur le projet de fermeture.

Le Petit ZPL : Lors du dernier conseil municipal, le 22 mai 2017, la commune affirme qu’elle n’a pas prévu de plan B, par exemple en cas de retard des travaux ou si vous obtenez gain de cause. Qu’en pensez-vous ?

Louise : Stratégiquement, ils ne veulent pas parler de plan B. En refusant de divulguer l’information ils essaient de montrer qu’ils tiennent les rênes.

Le Petit ZPL : Il y a récemment eu un article dans Le Parisien dans lequel le maire de Palaiseau dit que l’avis de la préfète « n’est pas nécessaire » concernant la fermeture de l’école… Un commentaire ?

Flora : D’abord revenons sur le vice de procédure : la loi prévoit très clairement que dans le cas d’une fusion d’écoles, la délibération du conseil municipal doit être votée après l’avis de la préfète. Or, la préfète n’a rendu son avis que le 1er février 2017, soit un mois et demi trop tard, après la délibération.

Concrètement, s’agissant de l’article du Parisien sur la notion de nécessité de l’avis, on voit bien qu’il y a eu un changement dans la stratégie de la mairie. À la réunion d’information du 29 mars, il a été dit que la préfète avait pris un avis qui valide le projet de fusion, et que donc, toute la procédure est régulière. Sauf que c’est ignorer que le dernier détenteur pour contrôler la légalité, c’est le juge. C’est le pouvoir judiciaire, ça fait partie de nos institutions d’avoir toujours un juge qui contrôle la légalité des actes de l’administration.

Mais là, dans l’article, la mairie évolue vers un discours qui dit que « finalement l’avis de la préfète n’est pas nécessaire ». Cela démontre bien un changement de stratégie et des déclarations contradictoires de la part des représentants de la commune.

Le Petit ZPL : Donc pour être clair, l’avis de la préfète dans le temps imparti est obligatoire, la mairie ne peut pas y déroger ?

Flora : Exactement. En tout état de cause, ce sera au juge de statuer. Très clairement le législateur a prévu qu’une fermeture doit être prise après avis de la préfecture. Là, je ne pense pas que le magistrat voudra heurter le législateur et aller à l’encontre de la loi. On verra bien.

Le Petit ZPL : Quelles sont les suites si vous obtenez gain de cause ou si votre requête est rejetée ?

Louise : On continue !

Flora : En fait il y a trois possibilités. Soit le juge annule sur le fond et on fait la fête… Soit il annule la délibération sur un vice de procédure c’est à dire qu’il constate une irrégularité sur la forme, donc, il risque d’y avoir un nouveau combat parce que le projet restera sur la table… Si la requête est rejetée, on dira qu’on a mené une belle bataille et que nous avons démontré que nous ne sommes pas résignés.

Le Petit ZPL : Si la requête est rejetée, vous continuerez à avoir un œil sur la façon dont la fusion se fait ?

Louise : D’autres écoles sont susceptibles d’être concernées à Palaiseau. Donc le combat ne s’arrêtera pas là. Mais ce combat n’est pas un combat contre la municipalité de Monsieur de Lasteyrie, ça aurait pu être n’importe quel maire, on aurait fait la même chose. On se bat pour nos enfants, pour une école humaine respectueuse des enfants. On est en train de nous dire que Palaiseau est une ville endettée avec de lourds emprunts, mais ce n’est pas sur l’éducation des enfants qu’il faut faire des économies !

Fanny : Et pourtant lors des premières discussions au mois de mai 2016, la municipalité a mis cela en avant : les enjeux économiques avantageux, puisque cela allait faire du personnel en moins… De plus, Il semble qu’ils aient juste fait des prévisions pour l’année prochaine, sans préparer ce projet sur le long-terme.

Adeline : Depuis le début on a parlé de quoi ? De chiffres, d’effectifs, de bâtiments, de surfaces, de travaux… Et la dimension humaine, pédagogique dans tout cela ?!

Flora : Il faut replacer l’enfant, l’humain, au centre des préoccupations de notre commune. C’est pour cela que nous nous battons pour l’école Bara.

Propos recueillis par l’équipe du Petit ZPL

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