#3 – L’auto-intimidation et l’intimidation invisible

Organigramme d'une municipalité

Lors de nos fréquentes distributions du Petit ZPL dans la ville, dans la rue, sur les marchés ou encore lors d’événements festifs – s’il en reste à Palaiseau ? – il nous est souvent arrivé de rencontrer des Palaisiens appréciant et/ou comprenant la démarche mais dans l’impossibilité d’acheter le journal parce qu’employés par la municipalité. Le simple fait d’être vu en possession du journal indépendant, et quelque peu satirique, serait susceptible de mettre dans une situation inconfortable si des cadres de la Mairie le remarquaient.

Ces constatations poussent à réfléchir sur le sujet. Quel système permet à un employé municipal, avant tout au service des Palaisiens et payé par les impôts, d’avoir ainsi peur pour son poste ? Peut-on vraiment avoir une opinion quand on est employé par la mairie ? D’autant plus quand le patron est maire, tête de liste d’un parti politique.

Zone de pression libre

Bien évidemment l’employé municipal souhaite garder son poste et son salaire. Un boulot dans la fonction publique est perçu comme une chance aujourd’hui, le marché de l’emploi étant féroce. On peine à trouver du boulot et encore plus à trouver un job pour lequel on est qualifié. Si on trouve une place, mieux vaut la garder. Certains sont, ou ont été, vacataires en situation précaire au sein de la mairie des années entières avant d’espérer peut-être décrocher un contrat. Salarié du public ou du privé, même combat. Le patron est roi. Et ça ne va pas en s’arrangeant.

Néanmoins l’employé municipal sait que la possession d’un journal ne lui coûtera pas son poste, il ne sera jamais viré pour ça. Ce serait grotesque, évidemment. Ce qu’il sait davantage c’est que sa hiérarchie peut aisément le foutre au placard, lui pourrir la vie et/ou à terme ne pas renouveler ou pérenniser un contrat, si précieux. On pense facilement à des exemples de collègues de terrain qui ont un peu trop cherché à bien faire leur boulot, souhaitant agir utilement, mais à qui on a rapidement rappelé quelle était leur place dans la hiérarchie. Ces derniers connaissaient pourtant bien le terrain et ses problématiques ainsi que ses habitants et son tissu associatif. Ceux qui choisissent et décident sont bien sûr dans les bureaux, bien loin de la réalité. Ils appliquent les décisions d’une « équipe municipale » élue à 6 615 voix pour 20 862 inscrits. Une équipe de « représentants » qui ne représente pourtant que 32 % des Palaisiens.

Organigramme d'une municipalité : une pyramide alimentaire
Organigramme d’une municipalité : une pyramide alimentaire

Alors, l’employé municipal n’est pas fou. Un journal qui, entre autres, charrie un peu son patron et souhaite informer les Palaisiens, ça peut l’intéresser, mais bon… faut d’abord essayer de remplir le frigo. Pour feuilleter Le Petit ZPL, il faudra s’planquer, être discret. C’est d’autant plus malheureux que ça semble tragiquement logique. C’est la même chose pour beaucoup d’autres exemples que celui du journal. L’intimidation est permanente, et invisible, donc beaucoup plus dangereuse. Beaucoup d’employés sont conscients de ces situations d’autocensure et d’intimidation mais peu osent les remettre en cause alors qu’ils en sont eux-mêmes victimes.

Ils éviteront de prendre part à des manifestations à l’encontre des décisions de leur employeur, quand bien même c’est un droit fondamental. Ils brandiront pourtant à tout-va leur devoir de réserve, hésiteront fortement à se syndiquer, et même à acheter un journal.

Cumul des mandales

Il en va de même pour les employés de la ville de Palaiseau comme pour ceux de la communauté Paris Saclay (anciennement CAPS, désormais « CPS »), eux aussi « agents de la fonction publique et territoriale ». Nous sommes allés à la rencontre de ceux qui travaillent à la Médiathèque George Sand à Palaiseau. Nous leur avons proposé d’accueillir Le Petit ZPL dans leur rayon presse aux cotés des quelque 50 autres mensuels, hebdomadaires ou quotidiens des groupes Lagardère, Drahi, LVMH, Arnault etc. Là encore nous avons essuyé un refus. Le journal serait un peu trop engagé disent-ils, évoquant des craintes de conflits avec la municipalité. En effet le maire, Mr de Lasteyrie, est aussi vice-président de la CPS et il existe un partenariat entre le Service Culturel, entre autres, et la médiathèque. On peut pourtant lire Valeurs Actuelles – journal d’extrême droite – dans des médiathèques du réseau CPS, comme le souligne un des employés. Mais paraît-il que Le Petit ZPL parle de sujets « trop locaux » pour trouver sa place à la médiathèque de Palaiseau, contrairement au Républicain de l’Essonne ou au Palaiseau Mag, qui eux, y trônent logiquement en leaders de l’info locale.

Arde

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